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On ne se remet pas d'une croisière Costa

Publié le par Stéphane GOMEZ

Le croisiériste italien Costa nous promet de voir le monde autrement ou nous interpelle sur le fait qu'on ne se remettra pas de l'avoir fréquenté. Si j'étais un peu cynique, je dirai que les passagers du Costa Concordia échoué sont du même avis. Comme je suis plus naïf que cynique, je me demanderai surtout si le conseiller en communication du résident de l'Elysée n'a pas été débauché de Costa Croisière.

 

Tout y est, l'utilisation abusive des moyens de l'Etat pour faire sa campagne en plus.

 

Car cela a été dit mais mérite d'être de nouveau souligné: c'est le candidat SARKOZY qui parlait hier soir, sur 6 chaînes simultanément et à une heure de forte écoute. Toutes les nombreuses et coûteuses (modeste, vous avez dit "Etat modeste"?!) cérémonies de voeux n'auront été que l'occasion de critiquer et d'attaquer le candidat socialiste et ses propositions. Au nom de sa posture présidentielle, le petit Nicolas n'aura fait qu'abaisser la fonction pour mener sous fond d'argent public sa campagne électorale. L'actuel résident n'a pas à ces occasiions partagé sa vision de la France, comme ont pu le faire avec intelligence et retenue ses prédécesseurs en pré-campagne, il a clairement et précisément attaqué les propositions socialistes, abaissant une nouvelle fois la fonction présidentielle dont la souveraineté nationale l'a investi.

 

Sur le fond de l'intervention de hier soir, il n'y aura rien eu de surprenant. Badinguet a laissé parler son "bon sens", prenant même des paris absurdes sur l'avenir. On en est à la conversation de bar PMU. C'est une constante de la rhétorique sarkozyste: "il ne faut pas être bac plus 10 pour savoir que...", "il ne faut pas avoir fait de longues études pour comprendre que...", "il ne faut pas avoir fait St-Cyr pour se rendre compte que...", "tout le monde sait bien que...",... Toute la politique de Nicolas SARKOZY se sera drapée du voile pudique du "bon sens populaire", mais comme toute pudeur ce "bon sens" n'aura surtout été qu'hypocrisie, car toujours c'est l'idéologie qui aura dominé les choix de Tsarkozy. Du bouclier fiscal à l'élargissement des droits de construction d'un tiers jusqu'à la suppression de la limite légale de travail hebdomadaire à 35 heures, c'est toujours le dogmatisme ultralibéral qui domine, la faveur aux riches et aux dirigeants contre la masse de ce peuple qu'on dit parfois souverain.

 

Au-delà de la rhétorique, cette éternelle insistance pour le "bon sens" écoeure pour l'image que cela renvoit de la politique et de la fonction présidentielle. Nicolas SARKOZY ne se propose pas d'élever la politique, le niveau d'échanges et des débats, la conscience collective, il se propose au contraire de toujours l'abaisser en quelques formules toutes faites, signalant et signant son mépris pour le politique et son mépris pour le peuple, à qui il ne faut pas présenter et expliquer des propositions complexes mais octroyer des solutions simples, simplistes.

 

Ce voile de simplicité et de bon sens n'est qu'au service d'un dogmatisme idéologique qui ferait passer Mao pour un pragmatique. Si l'on ne retient que quelques exemples des mesures annoncées hier soir, on se rend rapidement compte à quel point elles servent d'abord des intérêts de clans plutôt que les Français et le redressement de l'économie française.

 

Augmenter les possibilités de construction de 30%, voilà qui va faire plaisir aux promoteurs immobiliers et surtout aux grands groupes de BTP (BOUYGUE, qui a dit BOUYGUE?!), mais en quoi cela peut-il être une réponse au problème du logement, lorsque les offices sociaux publics ou privés n'ont pas les moyens d'acheter les terrains, lorsque les collectivités territoriales ne sont pas outillées pour mener librement une politique foncière, lorsque les aides de l'Etat sont basées non pas sur le soutien à la construction, sur la pierre, mais sur les loyers qui sont reversées aux propriétaires, lorsque des communes ne respectent pas l'obligation de 20% de logements sociaux et que le président de la République et son Gouvernement ne proposent rien en la matière, aucune augmentation des amendes, aucune contrainte par voie préfectorale, car il ne faut surtout pas fâcher ses amis politiques, qu'ils soient maires ou qu'ils soient promoteurs?!

 

Ne parlons pas de la TVA dite "sociale", le nouvel outil magique qui doit permettre de résoudre la quadrature du cercle. Pour financer la protection sociale, on va baisser les cotisations sociales des employeurs! Ah?! Donc cela va créer des emplois, comme on l'a déjà vu depuis 15 ans que l'on passe son temps à baisser les cotisations salariales. Bon, donc maintenant il faut retrouver de l'argent, donc on augmente la TVA, l'impôt du pauvre, pour le mettre à un record historique français et quasi européen (n'en déplaise à Nadine, persuadée que le taux allemand était plus élevé!). Mais point de problème, car les entreprises à qui on vient de baisser les cotisations pour qu'elles ne créent pas d'emploi ne vont pas augmenter les prix de vente mais prendre sur leurs marges pour perdre d'un côté ce qu'elles ont gagné de l'autre. Ce sont à ces moments là que je me dis que je ne suis pas un bon économiste, car malgré toute la brillance de l'explication présidentielle je ne parviens pas à voir la cohérence de la démarche et son efficacité demain en terme de créations d'emplois et de sauvegarde du pouvoir d'achat!

 

Pour faire bonne mesure, il faut rajouter à ce bilan l'impuissance entretenue de celui qui se voulait le président du volontarisme. Comment prétendre taxer aujourd'hui les transactions financières internationales quand on ne l'a pas fait pendant 5 ans? Comment se faire l'apôtre de la "règle d'or" lorsque l'on est le gouvernant qui a le plus fait sombrer le déficit français au service d'une politique fiscale désastreuse au profit de l'intérêt des nantis? Il se propose de mettre une amende aux grandes entreprises ne recourant pas aux apprentis (comme si toutes étaient sur des secteurs concernés), comme s'il n'avait pu le faire avant, comme si l'apprentissage c'était l'emploi, comme si des mesures concrètes en terme d'emploi avaient été prises depuis 5 ans en dehors du dogmatique non-remplacement d'un poste de fonctionnaire sur 2, à un moment où il faudrait au contraire maintenir la consommation par l'emploi public.

 

Nicolas SARKOZY est dans l'incantatoire quand les Français attendent avec urgences de réponses. Il leur avait demandé de le juger sur ses résultats, son bilan est éloquent, qu'il soit effectivement jugé dessus et pas seulement sur les promesses qu'il s'engage à tenir dans les 5 ans à venir quand il n'en a rien fait dans les 5 ans passés.

 

SARKOZY, c'est vraiment Costa Croisière: il voit le monde différemment, comme couché sur les flancs d'un navire, et comme avec Costa, pas sûr qu'on s'en remette. Cohérent jusqu'au bout, dans la tradition Costa, il fuit pendant que ses passagers sombrent!

 

Non, vraiment, au printemps, pas de croisière pour moi, je vais plutôt prendre un pédalo, j'ai plus confiance dans le capitaine!

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