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1ère, 2ème, 3ème aspiration

Publié le par Stéphane GOMEZ

     Petite manifestation de fin de semaine, j'étais cet après-midi devant l'hôpital de l'hôtel dieu, pour participer à la contre-agitation des féministes laïcards, qui s'opposaient aux prières publiques de S.O.S. Tout Petits, qui fêtait ainsi, Bible à la main sur le trotoir, ses 20 ans de nuisance.

     Côté intégriste, ambiance B.C.-B.G., même les quelques jeunes, dans leurs vêtements de marques bourgeoises, faisaient déjà vieux; surtout des hommes (je dirai même que je n'ai vu aucune femme dans ce groupe là, mais je suppose qu'il devait bien y en avoir) quelques prières, à genoux, devant une statuette dorée de Marie. Peut-être une cinquantaine d'adeptes de la messe en latin.

     Guère plus de monde de l'autre côté, quelques mètres plus loin, et une ambiance plus joyeuse, avec d'inénarrables slogans pour cette première contre-manifestation interdite aux moins de 18 ans: "un cierge, dans mon lit, je jouis", "les apôtres étaient 12, ça fait une bonne partouze; avec Jésus ça fait 13, ça peut faire une bonne baise", "priez moins, baisez plus", "1ère, 2ème, 3ème aspiration, nous sommes toutes des salopes avortées", "les cathos au zoo, libérez les animaux",…

     Bon, beaucoup d'anticléricalisme dans tout ça, mais l'ennemi était connu; j'ai bien sûr le sentiment que beaucoup de participants, chez les (très jeunes) anarchistes, ne distinguaient pas catholiques et intégristes, mais ce n'est pas vraiment le moment de la subtilité analytique, surtout que les manifestants se réclamaient du seul catholicisme et que l'Église romaine ne semble pas vouloir faire le ménage devant son église (au contraire même, Benoit XVI sous pape semble vouloir ouvrir grandes les portes de la sacristies à ses intégristes).

     L'important était de bien marquer notre opposition à cette minorité réactionnaire qui s'arroge encore le droit de penser pour tous. Ils sont contre l'avortement? C'est bien sûr leur droit. Pour être franc, ce n'est pas la conquête (car s'en est une, indiscutablement) féministe qui m'enchante le plus, car je ne peux pas m'empêcher de croire que chaque avortement (je mets à part les avortements après un viol) est le signe d'un échec pédagogique et social, qui a fait que l'on a du en arriver -faute d'éducation, de dialogue, à cause de tous les interdits moraux- à l'avortement alors qu'il aurait fallu être en capacité d'utiliser des moyens de contraception. L'éducation à la sexualité / aux sexualités à encore des efforts à faire pour expliquer à tous (les filles, mais aussi les garçons) l'usage de la pilule et des préservatifs.

     Mais que l'on soit contre l'avortement ne peut en aucune manière permettre de s'arroger le droit de l'interdire aux autres! Au nom de quoi, moi qui ne porterai jamais d'enfant, qui ait reçu l'éducation me permettant d'utiliser les moyens de prévention, pourrai-je dire à une femme, jeune ou pas, qu'elle n'a pas le droit de choisir si elle veut ou pas un enfant. Au nom de quoi jugerai-je les motifs de son geste? Au nom de quoi disposerai-je de son corps et de son avenir? Nul n'impose aux anti-avortements d'avorter, qu'ils ne viennent pas nous dire ce que nous devons faire de nos vies.
     Tout cela relève de la liberté individuelle. Ma seule responsabilité amicale se limite à accompagner les parcours individuels, à aider les un(e)s et les autres dans mon entourage dans leurs choix, qui est d'avoir un enfant, ou de ne pas en avoir. Je ne suis pas là pour juger ce qu'ils font de leur vie.

     Dernier mot, qui n'est plus vraiment sur le sujet tout en l'étant pleinement: un anar', fort de ses co-manifestants qui l'entouraient, n'a rien trouvé de plus militant que de frapper dans le dos un jeune blond allant rejoindre les agenouillés, avant de bloquer le passage à un quinqua bedonnant. Je n'estimerai même pas le courage qu'il faut pour frapper quelqu'un d'isolé, dans le dos qui plus est.

     La violence comme forme de résistance à un pouvoir oppressant ne me gêne pas. Retournée contre un individu, parce qu'on s'arroge la vérité de penser vrai contre "l'autre", quand bien même cette pensée vraie se veut progressiste, ce n'est qu'une forme de totalitarisme politique et moral, aussi détestable que celui des réactionnaires qui chantent leur ordre moral en latin.

     On en revient au débat sur la liberté individuelle. Je combats tous les ordres moraux, d'extrême-droite comme d'extrême-gauche. Je veux bien être une salope avortée, je refuse qu'on m'obligé à l'être.


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