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Féodalité

Publié le par Stéphane GOMEZ

La défaite du PS n'en finit pas de faire parler. A mon tour, je dois à mon public si attentif d'y aller de mon commentaire plein de pertinence.

Déjà, banalement, rappelons que la victoire de l'UMP est toute relative. La Gauche est largement majoritaire parmi les malheureux 40% d'électeurs qui se sont déplacés. L'UMP est arrivée en tête mais règne sur une Droite moribonde. Qu'importe, l'effet médiatique est là et SARKOZY a maintenant "l'onction populaire" pour continuer ses contre-réformes. Les Verts font -de nouveau- une percée aux élections Européennes, et -de nouveau- Daniel COHN-BENDIT, le très libéral Vert, annonce que -de nouveau- plus rien ne sera pareil à Gauche et dans la politique française et dans la politique européenne et dans la Galaxie! L'Extrême-Droite est atomisée par le sécuritarisme raciste de SARKOZY. Le Front de Gauche sauve les meubles mais est-ce que le PCF est encore vivant? Ou n'a-t-il que fournitles troupes qui lui restent pour "MELENCHON 2012"? Le NPA se révèle de plus en plus un pétard mouillé, la LCR et l'omni-BESANCENOT paraissant avoir râté leur coup...

Bon, et le PS?

Il paie une erreur stratégique majeure. Personne ne connaît BARROSO et le front anti-SARKOZY n'a pas pris car les Français n'attendent pas qu'on leur dise contre qui on est mais pour quoi on est, surtout face à cette horreur économique européenne. Il y a eu aussi des stupidités techniques: quand il y a entre 20 et 30 listes, on ne présente pas un bulletin abscon, invisible! Dans mon bureau de vote, où la liste PS était 20ème au tirage au sort sur 21, j'ai vu des électeurs passer et repasser, hésiter, avant de ne prendre que les bulletins verts d'Europe Ecologie (et de LALANNE, sic) et oranges du Modem. Ce n'est peut être pas très glorieux à avouer, mais c'est aussi une réalité: dans ce moment bref de décision pour de nombreux électeurs, l'impact visuel joue, et probablement que c'est sur l'impact du bulletin que LALANNE a réussi à faire 4% dans le Sud-est et que le PS a perdu 2-3 points (ce qui fait dans le Sud-est un élu de moins, comme quoi ce n'est pas tout à fait neutre).

Au-delà, il y a un profond dysfonctionnement du PS. Je lis actuellement une biographie sur Frédéric Barberousse, et j'ai l'étrange impression d'y voir des parallèles: d'un côté la fragile monarchie française, qui parvient à mettre en place un Etat centralisé, puissant, qui l'emporte finalement de l'autre côté sur le puissant empire romain germanique, qui ne parvient pas à se sortir du féodalisme; d'un côté, le RPR - UMP il y a 10 ans, pris en main et mis en ordre de bataille par SARKOZY, de l'autre un PS notabilisé où les luttes d'influences se mènent contre l'intérêt collectif. Et on se retrouve avec des présidents de Région qui expliquent à voix haute qu'avec ROYAL (qu'ils soutiennent pour l'investiture en cours) la présidentielle est perdue mais que le contre-coup leur permettra de sauver "leurs" régions, leurs fiefs; et on se retrouve avec le Maire de Lyon qui fait une "bourde" (c'est ce que m'assurent de ses proches) le jour du grand meeting régional de PEILLON, écclipsant celui-ci le lendemain dans la presse avec ses déclarations sur un vote PS "du bout des doigts"; et on se retrouve avec des ROCARD, LANG, VALLS & Co. qui dissertent sur tout et surtout le contraire du projet socialiste.

Qu'est-ce qui reste de cela? Une élection européenne où l'abstention est à 60% mais 66% chez les ouvriers, 75% chez les jeunes: la France du "non" n'a pas voté socialiste, puisqu'elle n'a pas voté. Elle était revenue sur la candidature "socialiste" de ROYAL à l'élection présidentielle dans une logique sociale anti-SARKO le néo-libéral, puis s'en est retournée. Les clientèles électorales / vassaliques sont solides, elles permettent aux seigneurs de se maintenir dans leurs fiefs communaux ou leurs cantons, mais déjà les seigneurs régionaux sont en péril car leurs droits féodaux sont indirects et plus lointains, et surtout le suzerain est fragile: il réclame son droit d'ost, à chaque bataille, mais le service rendu est minimal et donc le royaume en péril au fur et à mesure que les défaites facilitées par ce soutien mou s'accumulent. Il n'est pas surprenant que ce soient ceux qui sont le moins allés à la bataille qui ont été les 1ers à monter à la tribune pour critiquer la direction et le fonctionnement interne.

Que reste-t-il de cette vision féodale du PS? Pour gagner, le PS doit reconquérir les forces qui lui ont manqué: en 2005 comme en 2009, le PS s'effondre lorsqu'il se coupe des ouvriers, employés et jeunes, par un discours pas assez social. Le mythe du Modem a vécu, qu'on en prenne acte. Et le parti doit être réorganisé autour d'un but collectif et plus d'intérêts locaux et particuliers. Et puis bon, soyons outrageant: que le PS se reconstruise autour d'un but collectif qui soit de changer la vie des Français, pas de changer la vie de certains de ses élus...
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