La Bête...

     À force de nous focaliser sur le match médiatique -i.e. décidé par les media- Marie Ségolène contre le petit Nicolas, on en oublie, dans la torpeur de la peopolitique qu'au-delà de notre adversaire de classe se trouve nos ennemis, ceux qui ne se contentent pas de refuser l'égalité mais contestent également la liberté (même si ce n'est qu'une liberté formelle, celle qu'on nous offre le plus souvent).

     Dans le Morbihan, Philippe De VILLIERS (P2V pour les intimes, dont je ne suis pas) a tenu ce week-end les universités d'été du Mouvement Pour la France, devant 700 militants, principalement des retraités (moi qui croyais naïvement que les universités politiques s'adressaient principalement aux jeunes militants…).

     Le Fou du Puy (et ancien ministre de CHIRAC) s'était fait remarquer par ses délires contres les mosquées clandestines (se propose-t-il dans construire des officielles en Vendée, pour qu'il n'y en ait plus d'officieuses?) ou ses tirades contres les footballeurs de l'équipe de France, ces vrais "faux citoyens" qui offrent des places de foot à des expulsés de Cachan en situation régulière!

     Pendant que dans la traditionnaliste Bavière, surgissant de sa papamobile, sa gracieuseté Benoit XVIème siècle rappelait au bercail les cathos intégristes (car l'intégrisme et la fanatisme, faut-il le rappeler, ne sont pas les privilèges que d'une seule religion), dans le Morbihan, Phiphi a fait l'annonce que personne n'attendait: oui, il est candidat à la présidence de la République!

     Et le voilà qui présente son programme en 5 slogans ridicules, comme à son habitude (il est bien le seul à se croire un talent de "petites phrases" sarcastiques): "l'Europe des patries et pas l'Europe de l'entrée de la Turquie", "le droit au mariage et pas le droit au mariage homosexuel"… (on voudra m'excuser de ne pas être sûr des citations, mais je "confesse" ne pas les avoir parfaitement notés, peu enthousiaste aux propos tenus).

     Sur le fond, rien de nouveau, on valorise le travail avec la suppression de ces maudites 35 heures qui ont rendu fainénant (alors que l'ultralibéralisme, c'est connu, libère les énergies! une des vertues du "marche ou crève"), on soutient la famille contre ces écoeurants homosexuels qui réclament le droit de s'aimer, et on défend la patrie, la France éternelle rurale et catholique contre la Turquie islamiste (moi qui la croyait encore laïque!).

     Sur le fond, donc, rien de nouveau: le travail, la famille, la patrie. Là où MÉGRET à des relents fascisants, comme LE PEN, De VILLIERS représente lui l'extrême-droite passéiste, réactionnaire, et tout aussi dangereuse et écoeurante.

     Le problème est celui de savoir si le marquis d'opérette est capable aujourd'hui, face à un LE PEN vieillit et un F.N. embourbé dans les querelles de succession, d'incarner comme veut le faire Marine, la fifille au borgne, un extrémisme médiatiquement "soft", une forme plus conciliante (sans les petites phrases sur l'Holocauste, mais avec celles contre les "racailles islamistes", pour bien rappeler quel est son camps, devions-nous en douter) pour un fond tout aussi radical.

     De VILLIERS manque probablement trop de charisme pour parvenir à cette fin là, et Marine LE PEN n'est pas encore en position de le faire.

     Est-ce un soulagement? Non, car cela ne signifie pas que les idées d'extrême-droite reculent en France. Face à l'absence d'alternative claire à Gauche (alors que, votes après votes, les Français réclament une politique sociale et ambitieuse) et de discours pédagogiques sans complaisance pour rejeter les simplismes extrémistes, qui offrent des boucs émissaires en réponse à tous les maux, la lepénisation des esprits continue, avec de moins en moins de fard et de plus en plus d'audace.

     Et puis, la Bête rampe toujours! Quand je reprends les 5 propositions de De VILLIERS, pour l'ultralibéralisme, contre les 35 heures, le mariage homosexuels ou les étrangers, je ne vois pas, sur le fond, beaucoup de différences avec ce que nous propose SARKOZY! Le ministre-candidat qui se propose de briser les taboux, qui veut aller chercher les électeurs de Front National un à un, se donne les moyens écourants de ses ambitions personnelles. La Droite "décomplexée" qu'il défend, la voilà, c'est celle qui assume ses délires extrémistes.

     L'enjeu de 2007 est décidément décisif, c'est le choix entre 2 visions de la société française qui se pose: la "France d'après", d'après la République, ou la République, la République jusqu'au bout, qui n'est que, comme le disait JAURÈS, la forme achevée du socialisme! À chacun son choix…