Peu de Français entendirent ces mots, le 18 juin 1940
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Madame la Maire de Vaulx-en-Velin, Vice-Présidente de la Métropole de Lyon, Mme Hélène GEOFFROY ;
Monsieur le Président de l'ANACR, Monsieur Marius PELLET ;
Monsieur le Président de l'UFAC, Monsieur Robert GEA ;
Mesdames et Messieurs les Élus et anciens élus ;
Madame et Messieurs les Porte-Drapeaux ;
Mesdames et Messieurs les Présidentes et Présidents, représentants d'association ;
Mesdames et Messieurs ;
Les événements de juin 1940 sont, en France, une mécanique précise, durant laquelle la succession de décisions, jour par jour, heure par heure, aura des conséquences qui structureront la suite de la Deuxième Guerre Mondiale et l'avenir de la France.
Dans les Années 30, les dirigeants français se trompent sur la nature du futur conflit qui s'annonce, inévitable. Par pacifisme et soucis du sang des soldats, la majorité se réfugie derrière le phantasme d'une guerre défensive, d'usure, construction d'ivoire d'un état major qui de nouveau a une stratégie de retard, confond stratégie et tactique. Parmi les politiques, ils furent peu nombreux à comprendre l'erreur mortifère : Léon BLUM, Édouard DALADIER ou Pierre CÔT, qui se lancent trop tardivement dans une modernisation de l'appareil militaire français les quelques mois où ils peuvent se maintenir en fonction, sans parvenir à infléchir la vision militaire dominante de l'état major. Chez les militaires, ils sont encore plus rares : Charles De GAULLE est l'un des rares à appréhender ce qu'est la guerre moderne qui vient, pratiquée ou testée en Espagne depuis 1936 : une guerre de mouvements, une guerre de chars et d'aviation.
Cette erreur de conception du conflit conduit à l'attentisme de la « Drôle de Guerre », qui laisse à l'Allemagne nazie le temps d'accélérer et finir son effort d'armement pendant que la France patiente. En mai 1940, quand la Wehrmacht prend l'initiative, choisit le lieu et le moment, quand elle passe à l'offensive, c'est la Débâcle : la vaillance des soldats français ne suffit pas à contrebalancer les erreurs de fond commises ; ils sont parfois sacrifiés, notamment les soldats venus des colonies, comme ces tirailleurs sénégalais dont les corps reposent -parfois anonymes pour l'éternité- dans le tata de Chasselay.
Le Royaume-Uni, le 1er septembre 1939, déclare la guerre à l'hydre nazie quelques heures avant la France ; le 20 mai 1940 dans la poche de Dunkerque, ce sont des soldats français qui portent le poids de la bataille et paient le prix du sang, pour permettre au Royaume-Uni de rapatrier ses soldats tout en sacrifiant son appareil militaire. Ces enchaînements de faits permettent, le 17 juin 1940, au Maréchal Philippe PÉTAIN soucieux de préserver l'état major français de faire porter aux perfides Britanniques la responsabilité de la défaite militaire française et l'armistice séparé réclamé à l'ennemi alors que la France a perdu une bataille mais n'a pas perdu la guerre ; alors que la France dispose encore de la puissance de son Empire et des moyens matériels de ses puissants alliés Outre-Manche et surtout Outre-Atlantique.
Le lendemain, c'est un homme seul, isolé, méprisé par un Winston CHURCHILL qui recherche plus ou mieux et doit se contenter de ce jeune officier inconnu et reconnu de personne ; le lendemain, c'est un homme seul, isolé, provisoirement toléré par Winston CHURCHILL faute de plus ou de mieux, qui prononce ces quelques mots qui allaient changer la France, allaient lui permettre de sauver son honneur avant de lui permettre de changer le cours de la guerre.
Sur les routes de l'Exode, de la grande fuite des Françaises et Français qui cherchent un abri, un recours toujours plus au Sud du territoire métropolitain ; sur les routes de l'Exode qui voient 2 millions de Françaises et Français de tous âges et de toutes conditions croiser 2 millions de Belges ou Néerlandais et des corps d'armée en déroute, sans direction ni directive ; sur les routes de l'Exode que bombarde l'aviation allemande fidèle à la tactique de la Blitzkrieg, de la « Guerre Éclair », qui considère avec cynisme et efficacité que les civils sont des cibles car en frappant l'arrière on empêche l'organisation et l'efficacité du front militaire ; sur les routes de l'Exode, ils sont très peu à entendre ces mots qui retentissent et résonnent sur les ondes de la BBC : en ces instants tragiques, de sang et de larmes, qui peut écouter les ondes britanniques ? Parmi celles et ceux qui le peuvent, qui souhaite ou pense à le faire ?
Peu de Françaises, peu de Français entendirent ces mots, ces paroles fortes de leur simplicité. Cet appel, il fallut que le Général De GAULLE le ré-enregistre quelques jours plus tard, car dans la désorganisation de juin 1940, y compris à Londres, personne ne pensa à l'enregistrer. Personne ne pensa que ces quelques mots allaient faire l'Histoire.
Et décider du destin de la France.
Car avec ces quelques mots, que personne ou presque n'entendit alors, la France, la France véritable, pas celle de la trahison et de l'abandon, pas la France de la Réaction et de la soumission ; la France, la République Française entre en Résistance comme d'autres s'abandonnent à la Collaboration.
De cet appel que nul ou presque n'entendit allait naître la Résistance Extérieure et les Forces Françaises Libres, allait naître la Résistance Intérieure multiforme d'où émerge en mai 1943 le Conseil National de la Résistance puis en juin 1944 les Forces Françaises de l'Intérieur, allait naître le Gouvernement Provisoire de la République Française. De la République Française.
De ces quelques mots allait re-naître la République Française, celle des Jours Heureux. Ces quelques mots devaient inscrire la France parmi les puissances vainqueurs de la Deuxième Guerre Mondiale à un moment où la France officielle s'abimait.
Il n'y aurait pas la Nation Française telle que nous la connaissons, telle que nous la pratiquons, telle que nous pouvons la critiquer tout en la chérissant ; il n'y aurait pas cette Nation Française dans cette forme, dans cette réalité démocratique, républicaine, libérale, sociale et laïque, sans ces quelques mots, sans cet Appel, dans le brouillard froid de Londres, sans cet homme encore immensément seul et déjà immensément grand, Charles De GAULLE.
Sans cet appel, il y aurait probablement eu une Résistance, des résistances, comme il y en eu dans tous les pays occupés et brimés. Mais par cet appel que nul ou presque n'entendit, parce qu'il était un écho à l'appel à l'abandon, à la réaction et à la Collaboration de Philippe PÉTAIN quelques heures plutôt ; par cet Appel, la place -symbolique d'abord, politique et militaire ensuite- de la France allait changer dans cette conflagration des humanités qui n'en était encore qu'à ses balbutiements.
La Résistance française est multiforme : les jeunes martyrs des maquis du Vercors ou des Glières, les combattants de la Division LECLERC ou du Commando KIEFFER, les Rochambelles (les infirmières de l'Unité Rochambeau, qui accompagnèrent la 2ème Division Blindée du Général LECLERC jusqu'à Berchtesgaden), les imprimeurs -tels les époux MARTINET qui reposent au Cimetière de l'Égalité- qui fabriquent de faux papiers ou publient les journaux clandestins, les anonymes qui déposent un message ou guettent l'air de rien à une entrée pour protéger une réunion ;… Toutes celles et tous ceux, pour paraphraser Daniel MAYER, qui n'ont pas battu le tambour sur leurs morts, aux côtés de tous ces noms qui s'inscrivent dans les rues de nos villes ou sur leurs monuments aux morts.
Toutes ces Histoires d'hommes et de femmes, qui ne s'opposent pas, mais se nourrissent et se renforcent d'autant, toutes ces Histoires prennent racines et source dans cet Appel du 18 Juin 1940, affirmation de toutes ces mémoires de la Résistance, construite de toutes les résistances différentes mais uniques par leur rejet de l'Occupation, de la violence et de la haine nazie, de la Collaboration, toutes différentes et unies dans leur affirmation d'un idéal républicain.
Les évènements de juin 1940 sont, en France, une mécanique précise, durant laquelle la succession d'événements, jour par jour, heure par heure, aura des conséquences qui structureront la suite de la Deuxième Guerre Mondiale et l'avenir de la France. Par son Appel, le 18 juin 1940, quelques heures après qu'un dirigeant félon ait fait le choix de l'abandon avant de faire en octobre suivant, sur un quai de gare à Montoire, celui de la soumission ; par son Appel, le 18 juin 1940, le Général De GAULLE fait que la France, 4 ans plus tard, ne sera pas un territoire administré par les États-Unis d'Amérique ; que la France, 5 ans plus tard, sera au rang des pays vainqueurs d'une guerre qui ne fut pas un conflit des Nations mais une lutte sanguinaire entre des conceptions du monde.
Par cet Appel se pose les bases de la France des Jours Heureux, celle des matins calmes.