La Tchétchénie, hier et aujourd'hui
Je vous laisse en découvrir le texte…
“Oublier le passé, c’est se condamner à le revivre”, tel est l’avertissement que nous a laissé Primo LEVI, l’écrivain italien et survivant d’une autre Déportation que celle pour laquelle nous nous réunissons aujourd’hui.
Oublier le crime organisé en 1944 contre le peuple tchétchène, c’est se condamner à laisser d’autres crimes se commettre contre les Tchétchènes.
Oublier la déportation des Tchétchènes organisée en 1944, c’est comprendre les crimes commis aujourd’hui en Tchétchénie.
Les crimes actuels ne sont que l’écho du crime d’hier.
Le 23 février 1944, Joseph STALINE lançait la déportation du peuple tchétchène. En 6 jours, des centaines de milliers de personnes étaient conduites au Kazakhstan. Ce déracinement durera 13 ans pour ceux qui survivront.
Déjà dans les années 1930, 15% des Tchétchènes furent exécutés pour n’avoir pas plié devant l’illogique logique de STALINE, pour avoir résisté au poing serré de la prise en main totalitaire. Souvenons nous que le 14 juillet 1937, en une seule journée, ce sont 14 000 Tchétchènes qui sont exécutés.
Dans l’Europe encore en guerre qui commençait à découvrir les horreurs nazies, les Einsatz, les actions contre des populations civiles pour les débarrasser des éléments jugés militairement factieux ou socialement dangereux,
alors que la réalité des camps d’exterminations contre les juifs, les tziganes, les homosexuels ou les handicapés physiques et mentaux commençait à s’imposer comme une évidence même si aucun encore n’avait été découvert,
alors que les Alliés, héraut de la liberté et de la démocratie, pourfendeurs de l’hydre fasciste, se rencontraient pour définir la notion de crime contre l’Humanité,
dans cette Europe encore en guerre mais où un nouvel espoir luisait, l’un de ces Alliés, Joseph STALINE, l’auto-proclamé Petit Père des Peuples, faisait payer le prix du sang et de l’exil aux peuples sous sa domination,
et en premier lieu aux peuples caucasiens, aux Tchétchènes et aux Ingouches, condamnés pour “collaboration collective”, notion que seul un régime totalitaire peut inventer,
L’ensemble de la population tchétchène, l’ensemble du peuple tchétchène était aveuglément condamné car certains avaient eu l’ambition illusoire de reconquérir leur liberté durant l’occupation nazie, pour avoir pris les armes contre un système oppressif,
Un tiers des 480 000 Tchétchènes, Ingouches ou Balkares, hommes, femmes, enfants, vieillards, paiera de sa vie d’avoir voulu croire au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, un tiers du peuple tchétchène disparaîtra dans les goulags ou dans les wagons qui le conduisit en déportation,
Plus de 10 ans d’humiliations, de souffrances et d’atrocités qui ne finiront discrètement, sans excuses, qu’en 1957 lors de la déstalinisation administrative.
Commencent alors plusieurs dizaines d’années d’humiliations et de souffrances pour un peuple qui depuis le XVIII°s n’a pas renoncé à son indépendance,
avant que, trompés par les discours de démocratie et de liberté d’un ELTSINE qui ne manipule les mots que pour manipuler les élections, de nouveaux des Tchétchènes croient le temps venu de leur droit à l’autodécision, avant que de nouveau ils ne découvrent humiliations, souffrances et atrocités.
L’Histoire est écrite par les vainqueurs, et pendant plus d’un demi-siècle la déportation des Tchétchènes lancée en 1944, ce crime contre l’humanité qui fit disparaître un tiers d’un peuple, cette déportation sanglante n’existera pas dans la mémoire et l’indignation collectives, aucun de ses responsables, aucun de ses auteurs ne paiera pour ses actes.
Il faut une nouvelle guerre, lancée en décembre 1994 par un nouvel autocrate alcoolique, pour que lentement et discrètement nous commencions à nous rappeler le crime contre l’Humanité de 1944.
Il faut attendre février 2004, 60 ans après le début des faits, pour que le Parlement européen reconnaisse en mots prudents la déportation de 1944.
Mais quel fut l’impact de cette décision, quel fut l’impact de cette déclaration? A-t-elle fait la “une” de la presse,
ou n’a-t-elle été qu’une coupable déclaration de principes, une commémoration du passé pour mieux faire oublier ce présent qui se revivait car personne ne s’était souvenu de l’Histoire?
Faut-il un nouveau drame pour espérer prendre conscience d’un autre drame?
À l’indifférence de 1944, celle des gouvernements qui savaient et se taisaient, répond l’indifférence collective depuis 1994, depuis 14 ans.
Après 1937, après 1944-1957, parce que nous avons oublié notre passé, nous revivons depuis 1994 dans le silence à un nouveau crime contre l’Humanité.
Les gouvernements occidentaux ont fait le choix de ménager un régime autoritaire pour des raisons économiques ou d’influence stratégique; pour quelques barils de pétrole on célèbre les élections prétendues démocratiques en Russie, oubliant tous les crimes politiques.
Ils ont imposé un omerta médiatique et éthique. Ils continuent à défiler dans les palais du Kremlin, de ELTSINE à POUTINE, négociant en vie tchétchène les barils de gaz ou du pétrole caucasien.
Aujourd’hui nous commémorons un crime contre l’Humanité passé et nous commémorons un crime contre l’Humanité en cours.
Nous avons oublié le passé des Tchéchtènes, nous condamnons les Tchétchènes à le revivre.